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Billet d’humeur : COQUES EN STOCK, partie 2, la fin

Par Oleg

Des grades fantaisites :

Les monnaies américaines font, depuis très très longtemps déjà, l’objet d’un grading d’une précision chirurgicale, et d’un niveau de définition très détaillé qui ne laisse aucun doute à un acheteur quant à l’état de la monnaie qu’il convoite. En ce domaine, la numismatique américaine est en avance de plusieurs wagons sur le train de la numismatique mondiale. Les professionnels locaux maîtrisent parfaitement cette grille d’évaluation, et en même temps, on en attend pas moins de gens qui jouent à domicile.

Seulement il ne faut pas perdre de vue que la numismatique américaine est une numismatique moderne, dans le sens technique de production du terme. Leurs monnaies ont été produites au moyen de balanciers et avec des viroles, ce qui confère à leur monnayage une homogénéité de production à la sortie de l’atelier qui sert de base de comparaison à postériori.

Mais ces professionnels, incontestables sur leurs terres, sont complètements largués quant aux monnaies médiévales qui furent manufacturées en Europe et pour lesquelles il est beaucoup plus subtil de définir un grade en comparant des exemplaires d’une même émission et forgés d’une même main et pourtant tous différents. La qualité des monnaies de l’ancien monde est liée à la maitrise des ouvriers des ateliers monétaires : le fondeur devait sortir des lames de métal d’une épaisseur homogène, le tailleur devait couper à la cisaille ces lames en flans bien ronds, et ensuite la précision et la force de frappe faisait le reste quant au centrage et aux reliefs. Tous ces paramètres impliquent qu’il est rare de trouver une monnaie médiévale qui soit parfaitement ronde, bien centrée et avec tous ces reliefs. Il faut ajouter à cela le facteur circulation qui aura plus ou moins arrasé les reliefs, sans parler des conditions dans lesquelles ces monnaies auront été conservées depuis le moyen-âge ; collection, sols acides,… et les traitements que le dernier propriétaire lui aura éventuellement fait subir ; l’aura-t-il nettoyée ou décapée, ou l’aura-t-il laissée dans son état résiduel ? Alors quels critères doivent être prioritaires pour une bonne évaluation du grade ? Difficile de répondre à cette question, d’autant plus lorsque l’on est face à une monnaie extrêmement rare, et surtout lorsque l’on ne maitrise pas la connaissance de ce monnayage, n’est pas NGC ?

En effet, pour une monnaie qui n’existe qu’à moins de 10 exemplaires, personne n’aura assez d’éléments de comparaison, car souvent ils sont tous issus des mêmes fers et des mêmes mains et ont donc la même facture finale. Et si les artisans n’étaient pas les meilleurs, leurs productions étaient médiocres, et une « fleur de coin » de leur production ne sera jamais qu’un passable TTB face à la production d’un autre atelier plus habile. Cependant, quel que soit son état, sa rareté justifie de la grader et de la protéger sous coque, mais seulement par un organisme au fait de ce genre de monnaies.

Mais lorsque la monnaie en question a fait l’objet d’une délivrance très importante en quantité, il est fort probable qu’il existe tout de même quelques vraies FDC résiduelles, et là, la tâche de grading est plus aisée. Pourtant cela ne parait pas une évidence pour les américains, pour preuve cet exemplaire d’un blanc extrêmement courant sur-gradé en MS63 (SUP en français), alors que le flan est irrégulier, la frappe tréflé, et de surcroit cet exemplaire a subit un décapage en règle.

Tournai, 1411, guénar Charles Vi, frappe tréflée, exemplaire décapé

A quel moment croyez-vous cet exemplaire de qualité supérieure ? il es tout juste en TTB !!! n’avez-vous donc pas d’employés compétents capable de surfer cinq minutes sur la toile, ou de contacts fiables parmi vos clients auprès de qui vous pourriez vous aviser pour vous rendre compte que vous êtes loin de la vérité ? Ou est-ce que le propriétaire d’une monnaie aurait depuis peu l’option de pouvoir vous acheter un grade valorisant ?

Des gradeurs dégradés :

Grader des monnaies partait pourtant à l’origine, d’une bonne intention. Mais c’est comme dans tous les domaines, aujourd’hui les entreprises américaines du secteur ne pensent plus forcément numismatique et valorisation du patrimoine ou de la collection, mais profit immédiat, rapide et important pour satisfaire aux sirènes de leurs actionnaires. J’ai bien conscience que chacun doit y trouver son compte et ne vous demande pas d’être philanthropes et de fonctionner sur le mode d’une association loi 1901 à la française, mais là on est loin, très loin même, d’une démarche sérieuse, intègre, et de vos arguments qui nous affirment qu’une fois qu’une monnaie est mise sous coque par vos soins, son grade n’est plus contestable par un acheteur, ah bon ? vous êtes sur ? Parce que dans ce cas précis le vendeur en est pour ses frais avec sa triste monnaie, passée par un décapage en règle non signalé sur la coque !!! Sic !!!

Moralité, j’ai bien conscience que même un professionnel ne peut pas tout connaître dans tous les domaines, mais quand on ne connait pas, on ne devrait pas toucher sans avoir au moins prit le temps de chercher un peu ou de s’adresser à ceux (autres professionnels ou collectionneurs avertis) qui ont la connaissance de ce monnayage particulier et qui feraient office de consultants extérieurs. Il est grand temps de revoir votre ligne de conduite, d’agir en vrais professionnels du secteur et de nous respecter en tant que collectionneurs, en acceptant d’abord de refuser de grader ce qui n’en vaudra jamais la peine (monnaie trop commune et en état moyen ou inférieur pour le type, par exemple), en prenant le temps de la recherche et de la réflexion avant de poser un diagnostic de description et de grade précis et cohérent. Dans le cas contraire ; comment resterez-vous crédibles face aux vendeurs et aux collectionneurs dans cette démarche de vouloir à tout prix ; grader tout, n’importe quoi et n’importe comment ? Et, vous reste-t-il un grade assez haut pour démarquer du guénar ci-dessus soit disant en MS63, mon exemplaire de grand blanc au nom de Jean-sans-Peur frappé à Auxonne en 1412 recouvert d’une incroyable patine sombre et profonde, avec sa qualité de fabrication originelle et son état de conservation actuel ???????

auxonne_1412_blanc_jsp_3gr01_fdd14-5-2_coll-oleg.jpg

Finalement, je pense que je vais encore attendre encore avant de faire grader et coquer mes monnaies qui le mériteraient pourtant, faute de connaitre un professionnel du grading qui ait les compétences nécessaires à mon domaine de collection trop pointu pour leur niveau actuel de connaissance et d’appréhension nonchalante du sujet, où apparemment seul le profit est grade.

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