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Mâcon : Circulation illégale de pseudo-monnaies !
par Gilles Marchand
C’est lors d’un contrôle fortuit que deux commissaires ont découvert que des pièces métalliques n’ayant aucun cours légal circulaient et étaient acceptées comme de véritables monnaies dans toute la ville de Mâcon.
Après une enquête rapide, ils ont trouvé la source de ces pseudo-monnaies et pris toutes les dispositions nécessaires pour mettre fin à cette circulation illégale. Les coupables étaient des religieux officiant à Mâcon.
Cette histoire n’est pas un scoop mais s’est déroulée en 1557 sous le règne d’Henri II (1547 – 1559). Elle nous est parvenue grâce au “Traité de la Cour des Monnaies” datant de 1658 :
“Les commissaires de la Cour des monnayes estant deputez dans les provinces du royaume ont esté de tout temps en droit de décrier toute sorte de monnoyes estrangeres et autres pieces quelquonques, s’il ne leur estoit donné cours par ordonnance du roy ; les sieurs Aymery et de Riberolles, conseillers généraux de la dite Cour des monnoyes et par elle deputez, passans par la ville de Mascon au mois d’aoust de l’an 1557, y corrigèrent l’abus qui s’y estoit glissé depuis longtemps, et défendirent à toutes personnes, sur peine d’estre punis comme expositeurs et faux monnayeurs, le cours et l’exposition de certaine quantité de marques de plomb, vulgairement appelées pièces ou jettons de plomb, que les Doyen, Chanoines et Chapitre de l’Eglise Cathédrale de ladite ville faisoient distribuer par leur benestier, pour le payement des Choristes et autres prestres servans es ladite Eglise : lesquelles pièces avoient abusivement cours non seulement parmi lesdits prestres et Choristes de ladite Eglise, mais encore par toute ladite ville de Mascon, les unes pour six deniers, les autres pour doubles et deniers tournois. Duquel droit de faire et de distribuer les dites marques, lesdits Doyen, Chanoines et Chapitre soustenoient estre en droit et possession depuis plus de trois à quatre cens ans. Lequel abus fut corrigé par l’ordonnance desdits commissaires, nonobstant les lettres en opposition envers icelles impétrées par lesdits Doyen, Chanoines et Chapitre, de laquelle ils furent déboutez.”
Les pièces, objets de l’ordonnance, étaient en réalité des méreaux fabriqués et distribués par les religieux durant les offices. Ces piécettes en plomb ne ressemblaient d’ailleurs en rien aux monnaies émises à l’époque et les chanoines pouvaient difficilement être accusés de faux monnayage. Le reproche des commissaires étaient que ces méreaux réservés à un usage très restreint circulent librement dans la ville de Mâcon. Les chanoines tentèrent de se défendre en revendiquant un droit de battre monnaie vieux de plusieurs siècles mais furent rapidement déboutés de cette prétention.
On peut cependant se poser une question : Pourquoi cette circulation de méreaux en plomb parallèlement aux monnaies légales ?
S’agissait-il d’une monnaie de nécessité consécutive d’un manque de petites monnaies légales (les habitants de Mâcon ayant confiance dans les chanoines auraient utilisé ces méreaux de plomb à la place des monnaies défaillantes) illustrant ainsi la loi de Gresham, commerçant et financier anglais vivant à cette époque, qui établissait que la mauvaise monnaie chasse la bonne. Thomas Gresham avait constaté que lorsque deux monnaies circulent en même temps, les utilisateurs thésaurisent la “bonne monnaie” et utilisent la “mauvaise” dans leurs échanges quotidiens.
En tout cas, cette circulation illicite pris fin et le droit fut rétabli.
Classé dans : Documents d'archives, Histoire locale, Monnaies de Macon · Mots-Clés: fausse monnaie, faux monnayeur, Gresham, Henri II, Loi de Gresham, Macon, médiévale, monnaie, monnaies, nécessité
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